Concepts

Les définitions des concepts produites dans cette thèse sont classées par ordre d’apparition dans les chapitres et sections.

Livre

Chapitre/section 1.1. Le livre : fonctions, concept et modes de production
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Le livre est un artefact éditorial clos, il est le résultat d’un travail d’écriture et d’édition, de création ou de réflexion, un objet physique (par exemple imprimé) ou numérique (un fichier ou un flux) maniable voir malléable. Le livre est un concept, il donne lieu à des recherches et des théories spécifiques, il est également un champ d’études lié à l’histoire, la sociologie, les sciences de l’information ou la bibliothéconomie. C’est un objet qui délimite un texte, dont la forme et le format sont pluriels. Il s’agit d’un artefact produit selon des procédés complexes qui évoluent depuis plusieurs siècles. Le livre est une interface, pour reprendre l’expression d’Amaranth Borsuk, c’est un média qui permet d’inscrire et de transmettre des idées. Le livre est un objet technique, son existence même dépend de la façon dont il est conçu, fabriqué, produit et reproduit.

Artefact éditorial

Chapitre/section 1.4. L’artefact : entre production, fabrication et technique
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Le livre est un artefact, le résultat d’un processus technique complexe dont il conserve certaines traces qui sont autant des marques des choix techniques que des énonciations — pour reprendre la théorie de l’énonciation éditoriale d’Emmanuël Souchier. Le livre est un artefact éditorial, il porte ses conditions d’existence, il les révèle si nous lui consacrons une analyse théorique et pratique, et si nous acceptons de remettre en cause notre rapport à la technique comme nous y invite Gilbert Simondon.

Édition

Chapitre/section 2.1. Évolution de l’édition
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L’édition est un processus technique qui fabrique du sens sous la forme d’artefacts, comme le livre. L’édition est une activité située dans des environnements économiques (marchands et non-marchands), elle se décompose en des étapes précises qui peuvent varier selon ces environnements et selon le projet politique associé. L’édition comprend un travail de clarification et de mise en relation de contenus, sur et autour d’un texte, produisant une légitimation à plusieurs facteurs. La préparation de la diffusion des contenus — rassemblés, sélectionnés, travaillés, et légitimés — fait partie intégrante de l’édition. Au cœur de la démarche d’édition se situe la fabrication et la production de formes et d’objets éditoriaux, des artefacts qui révèlent ces façons de faire. L’édition est enfin un concept, principalement en raison des recherches académiques dont elle fait l’objet.

Acte éditorial

Chapitre/section 2.2. L’acte, le dispositif et l’action
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L’expression d’acte éditorial permet de prendre en considération la question de l’action en tant qu’effet de l’édition sur le texte et qu’effet de l’objet créé sur le monde. Le terme d’acte correspond à une définition de l’édition comme processus et comme réalisation d’une intention. Le geste appelle une intention sans prendre en compte les conditions de réalisation de cette intention. Nous considérons que les figures tutélaires du livre ne suffisent pas à expliquer l’édition. Considérer l’édition comme un geste limite ce processus à une série de décisions ou à la mise en place d’un contrôle sur le texte, sans en expliquer les rouages, et donc sans décrire précisément l’édition en tant que dispositif. L’édition est ainsi un dispositif technique permettant la médiation d’un contenu à travers la réalisation d’un artefact.

Dispositif éditorial

Chapitre/section 2.2. L’acte, le dispositif et l’action
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Un dispositif éditorial consiste en l’agencement de processus techniques en vue de produire un ou des artefacts, dans l’objectif de transmettre un texte. Il s’agit d’un dispositif parce que c’est une suite d’opérations liées et organisées dans un but précis, et que cette organisation technique est autant l’objet de décisions qui opèrent par des contingences matérielles, que le sujet qui génère des modélisations porteuses de sens.

Éditorialisation

Chapitre/section 2.4. L’éditorialisation en jeu
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L’éditorialisation est d’abord considérée comme l’édition sous l’effet des technologies numériques, mais l’apport des recherches récentes sur ce concept, et notamment celles de Marcello Vitali-Rosati, permet de considérer ce concept comme un outil méthodologique. L’éditorialisation et ses trois aspects (technologique, culturel, pratique) constituent un cadre de compréhension du numérique, en tant qu’un ensemble de dynamiques, ainsi que, dans le cas de notre étude, un moyen de comprendre ce qu’est l’édition aujourd’hui.

Chaîne d’édition

Chapitre/section 2.5. Le Pressoir : une chaîne d’éditorialisation
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Une chaîne d’édition est l’ensemble des processus, des méthodes et des outils nécessaires à la réalisation d’une activité d’édition, et plus spécifiquement à la création, la fabrication, la production et la diffusion d’un livre. Si l’objet de la chaîne d’édition est la génération d’un tel artefact, sa matière première est le texte sans s’y réduire. Une chaîne d’édition est basée sur une modélisation éditoriale qui doit permettre une gestion sémantique des contenus en vue de la réalisation d’un ou de plusieurs artefacts tels qu’un livre imprimé, un livre numérique, un document structuré ou toute autre forme permettant de diffuser des contenus, des idées, et de faire sens. Une chaîne d’édition est aussi, comme le terme de « chaîne » l’implique, une suite d’étapes linéaires, et à ce titre elle peut être critiquée et mise en regard d’autres dispositifs qui envisagent, de façon divergente, l’édition comme un entremêlement d’opérations en prenant en compte leurs relations et leurs apports mutuels.

Numérique

Chapitre/section 3.1. Le numérique : culture, politique et ubiquité
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Le numérique est une infrastructure technique permettant l’échange de données, il est composé de dispositifs d’affichage et d’interaction. Le numérique permet le développement d’usages à partir de technologies, ces technologies bénéficient en retour de ces pratiques pour évoluer. Le numérique est constitué de l’informatique en tant que modélisation calculatoire sur laquelle des machines diverses traitent des informations à l’aide de programmes, instanciés grâce à des protocoles et des standards. Le numérique est englobant et ubiquitaire, car il se structure avec le métamédia qu’est l’informatique. Des services comme le Web se fondent sur des réseaux de réseaux comme Internet, et font émerger des modalités d’écriture et d’édition, multiples et protéiformes. Les cultures numériques se forment avec les terminaux, les logiciels, les plateformes, les protocoles, les normes et les standards.

Livre numérique

Chapitre/section 3.2. Le livre numérique ou la pensée homothétique
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Un livre numérique est la transposition du modèle du livre dans l’écosystème numérique. Cela signifie tout d’abord l’utilisation de l’informatique pour la conversion ou la création des artefacts éditoriaux, puis la mise en réseau des fichiers produits afin de les rendre disponibles, et enfin l’usage de terminaux électroniques pour la lecture des fichiers. Le livre numérique répond à un modèle épistémologique qui met le livre, dans sa forme classique, au centre, reproduisant autant que possible l’objet ainsi que les pratiques d’édition.

Humanités numériques

Chapitre/section 3.4. Fondement de l’édition numérique au prisme des humanités numériques
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Les humanités numériques constituent une approche multidisciplinaire au sein des sciences humaines et sociales, à la fois comme une évolution des pratiques de recherche et comme une attitude critique face à l’usage des technologies. Il s’agit d’adopter des méthodes avec le numérique, et plus globalement avec l’utilisation de l’informatique, principalement pour calculer les données extraites des textes et exploiter ces calculs. Il s’agit aussi d’un mouvement critique réflexif, interrogeant les outils invoqués et l’effet de leurs usages sur nos modèles épistémologiques.

Édition numérique

Chapitre/section 3.4. Fondement de l’édition numérique au prisme des humanités numériques
Lien vers le contexte
L’édition numérique est un processus protéiforme, une fabrique du sens dont le numérique innerve des formes plurielles de cristallisation du savoir. L’édition numérique se distingue de l’édition par ses modélisations techniques diverses, autant dans la formalisation de textes, dans la constitution d’artefacts originaux, dans la définition de modalités de partage que dans la publication conjointe de contenu et de code. Un rapprochement peut être établi entre l’apparition des humanités numériques et l’émergence de l’édition numérique, nous considérons ainsi que celle-ci se fonde au prisme de l’approche pluridisciplinaire des humanités numériques.

Format

Chapitre/section 4.1. Les formats dans l’édition : pour une sémantique omniprésente
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Un format définit la façon dont des informations sont décrites et stockées, il s’agit d’une série d’instructions formalisées afin qu’une action soit réalisée par un agent. L’établissement d’un format est la condition de circulation d’une information, son choix révèle donc une intention mais aussi un acte. Dans l’édition, le format définit les caractéristiques techniques de la modélisation du texte, de sa structure et de la façon dont ses artefacts peuvent être produits. Il peut faire l’objet d’un standard afin d’être partagé et de permettre une interopérabilité voire une modularité. Définir un format n’est pas une action neutre, et participe à l’acte éditorial dans son ensemble.

Format de balisage

Chapitre/section 4.2. Les conditions de la sémantique : format texte et balisage
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Un format de balisage est une série d’instructions pour modéliser une information et plus particulièrement un texte. Ces instructions doivent être univoques, afin d’être compréhensibles par des personnes qui les lisent ou les machines qui les traitent. Tout fragment de texte peut ainsi être balisé pour déclarer le sens qu’il porte, marquant une distinction entre des données textuelles telles qu’une citation, un paragraphe ou même une date. Les balises sont des points de repères, permettant de naviguer dans un texte et de construire des modélisations épistémologiques.

Single source publishing ou édition multi-formats depuis une source unique

Chapitre/section 4.4. Le single source publishing comme acte éditorial sémantique
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L’édition multi-formats ou multimodale à partir d’une source unique est une méthode et un processus visant à produire plusieurs formats ou versions depuis une seule et unique source, en appliquant des conversions ou des transformations. Il s’agit de générer des formes variées, en répétant plusieurs opérations distinctes et néanmoins liées par une modélisation éditoriale commune, tout en restreignant les données en entrée à une seule origine. Le single source publishing est un ensemble de principes nécessitant une dimension interopérable. La source, et les éléments qui la composent, doit répondre à des standards pour que les programmes invoqués dans le processus soient capables d’appréhender la structure, afin de transposer une expression sémantique dans plusieurs formats de sortie — des manifestations. Les principes de l’édition multi-formats ou multimodale à partir d’une source unique sont d’ordre technique, mais, comme tout principe technique, ils sous-tendent des enjeux théoriques et épistémologiques, principalement autour de la modélisation éditoriale et donc de la construction du sens à partir de modèles de données.

Logiciel

Chapitre/section 5.1. Les chaînes d’édition : composer avec les logiciels
Lien vers le contexte
Le logiciel est compris ici comme un objet numérique permettant de réaliser des opérations de calcul grâce à un ordinateur. Le logiciel est l’interface — par ailleurs souvent graphique — entre un utilisateur ou une utilisatrice et des programmes, ces derniers étant eux-mêmes une suite d’algorithmes. Le logiciel est ubiquitaire, il a totalement façonné nos sociétés contemporaines. Le logiciel est une invention commerciale qui porte des valeurs marchandes plus qu’émancipatrices, cachant l’interaction avec la machine sous couvert de rapidité et de facilité. Son opacité nous conduit à le considérer comme une boîte noire dont le traitement des informations n’est pas toujours révélé, en raison de son code propriétaire ou de sa complexité inhérente. La documentation qui accompagne le logiciel n’est pas écrite pour comprendre ses modalités intrinsèques, mais uniquement pour aboutir à un fonctionnement, fonctionnement qui est rarement compatible avec une appropriation ou à un apprentissage. Par extension, un logiciel peut aussi être une application — dans le cas d’environnements encore plus fermés —, ou un service en ligne — pour une délocalisation totale. Le logiciel est ici distingué du programme, ce dernier étant une partie d’un logiciel, et pensé comme un composant pouvant être arrimé à d’autres programmes.

Fabrique

Chapitre/section 5.4. La fabrique : éditer des fabriques et fabriquer des éditions
Lien vers le contexte
La fabrique est un concept qui définit une manière de concevoir et de produire des artefacts. Parler de fabriques permet d’envisager un processus réflexif, qui se construit en même temps que l’artefact est conçu puis produit, et dont les deux mouvements s’écoutent et se répondent. Avec cette approche nous ne prenons plus seulement en considération des outils prééxistants, mais aussi et surtout un ensemble de méthodes, de pratiques et de processus qui se définissent à mesure qu’un travail de conception et de production est enclenché. L’entremêlement qualifie la fabrique, tant la mise en place d’un processus technique, l’apprentissage qui en est nécessaire et la création d’artefacts se croisent et se rencontrent. La fabrique est aussi considérée comme le pont entre des dispositifs dits industriels, qui placent la rapidité ou le rendement comme principes ou comme critères de réussite, et des pratiques dites artisanales souvent à moindre échelle, qui se concentrent sur les manières de faire autant que sur l’artefact produit. Construire, produire ou manufacturer, le résultat est donc un artefact qui a été élaboré puis formé, avec la technique.

Fabrique d’édition

Chapitre/section 5.4. La fabrique : éditer des fabriques et fabriquer des éditions
Lien vers le contexte
La fabrique d’édition est un phénomène, il s’agit de l’imbrication et de la réflexivité du travail sur le texte et de la constitution d’un processus technique permettant ce travail. Le choix, l’agencement voir le développement des outils d’édition sont réalisés en même temps que le texte est sélectionné, structuré, corrigé, mis en forme et publié. Il ne s’agit pas de deux calques qui se superposent mais d’un entremêlement de micro-actions qui donnent lieu à l’acte éditorial. La forme de l’artefact éditorial est façonné par le processus technique, et ce dernier est mis en place en fonction du projet d’édition.

Modélisation contextuelle

Chapitre/section 5.4. La fabrique : éditer des fabriques et fabriquer des éditions
Lien vers le contexte
Nous définissons la modélisation contextuelle comme une scénarisation d’éléments textuels au sein d’une chaîne d’édition multimodale. La structure de ces éléments et la mise en forme correspondante sont définies via autant de fragments de gabarits qu’il y a de types d’artefacts produits. En plus de baliser des suites de caractères, il est possible d’ajouter des paramètres pour enrichir les données ou préciser les règles de conversion ou de transformation. La définition de cette modélisation s’inscrit donc d’abord dans une perspective d’édition sémantique, où le sens est exprimé avant l’application d’un rendu graphique. La fonctionnalité de processing models en TEI ou l’usage des shortcodes avec le programme Hugo sont des implémentations de cette modélisation contextuelle.